Opération Calice : six ans d’enquête

pour rien

L’opération Calice (Kelk en néerlandais) est le nom donné à l’enquête judiciaire sur les abus sexuels commis sur des enfants et la possible tentative pour étouffer l’affaire au sein de l’Eglise catholique en Belgique.

Il était écrit dans les étoiles que la grande enquête fédérale sur les abus sexuels dans l’Église ne mènerait nulle part. Opération Calice : six ans d’enquête pour rien, de l’argent jeté par les fenêtres, une perte d’énergie. Mais il y a encore plus grave : beaucoup de faux espoirs pour les victimes déjà lourdement marquées et contraintes, une nouvelle fois, de se rappeler tous ces pénibles événements.

Pourtant, ce n’est pas un échec parce que la justice n’a pas voulu explorer le fond du dossier. Tout le monde se souvient encore du dynamisme peu commun avec lequel le juge d’instruction Wim De Troy et ses troupes ont débarqué à l’archevêché de Malines Bruxelles. Ce n’était pas une simple visite de courtoisie.

« Les choses sont allées très loin, jusqu’à forer des trous dans le sol de la crypte »

Les choses sont allées très loin, jusqu’à forer des trous dans le sol de la crypte ; un témoin
avait en effet indiqué que le cardinal y avait caché des documents secrets. Bien sûr, cela n’a rien donné. Même si de nombreux cartons contenant de la correspondance ont été saisis, dont des cartes
de voeux du Roi (mince alors !), on n’a rien trouvé qui puisse être de quelque utilité devant un tribunal.

 

Tout le monde le savait déjà à l’époque : la quasitotalité des abus consignés, quelle que soit leur gravité, étaient désespérément prescrits. Même en prolongeant le délai de prescription à quinze ans.

La justice n’a pu qu’en faire le constat. Ce qu’a également annoncé le parquet fédéral hier. Une gifle

de plus pour les victimes, c’est certain, mais on ne peut rien y faire. Le tribunal s’est focalisé sur l’abstention coupable dans le chef du Cardinal Godfried Danneels, des évêques et des supérieurs de congrégations. Les « Cassettes Danneels » avaient en effet révélé que l’archevêque était au courant des abus commis par Roger Vangheluwe et qu’il avait naturellement étouffé l’histoire. Des archevêques et des supérieurs des Frères n’en sortaient pas indemnes non plus. Mais toute personne s’y connaissant un tant soit peu en questions juridiques sait que rien n’est plus difficile que de fournir la preuve d’une abstention coupable. Il ne suffit pas d’être au courant de quelques éléments d’un délit, il faut que la douleur se soit fortement aggravée par votre négligence pour pouvoir être puni. Et la justice est à présent libérée de cet exercice délicat de réflexion. Si les faits sur lesquels porte l’abstention coupable sont prescrits, alors l’absence coupable de prévoyance l’est aussi. Le Cardinal Danneels, l’archevêque Léonard et le supérieur général Stockman peuvent dormir sur leurs deux oreilles. La justice ne peut plus rien tenter contre eux.

« Vangheluwe vit toujours caché. Une vallée tranquille, quelque part en France. »

Les avocats des victimes déclarent qu’ils vont demander des compléments d’enquête et que «l’affaire n’est pas encore terminée ». Pourtant les chances sont minces d’en obtenir encore quelque chose de substantiel. Mais ce ne sera rien d’autre qu’un petit combat dans la marge. Car on dirait bien que le rideau est tombé. Vangheluwe vit toujours caché. Une vallée tranquille, quelque part en France. C’est Rome qui a tout organisé pour lui, et les chances sont faibles de le voir ressortir en pleine lumière. Il a déjà causé assez de scandale, pour des faits dont le délai de prescription est l’éternité.

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Plus de 60.000 fichiers à caractère pornographique trouvés sur l'ordinateur de l'ex-évêque de Bruges

De nouveaux éléments sont apparus dans le dossier de l'ancien évêque de Bruges Roger Vangheluwe, rapporte le magazine Humo sur base du réquisitoire final du parquet fédéral lié à l'opération Calice, qui se penche depuis 2010 sur les abus sexuels au sein de l'Eglise. 

Trois personnes ont déposé plainte, et non deux, et plus de 60.000 fichiers à caractère pornographique ont été trouvés sur son ordinateur, dont certains impliqueraient des mineurs. Le parquet fédéral a toutefois affirmé lundi soir que ce matériel pornographique n'avait rien de punissable. Le troisième plaignant est un trentenaire de Flandre occidentale qui s'est manifesté en décembre 2012. Les faits visés datent de mai 1992, alors que la victime présumée était enfant de chœur. L'évêque est accusé d'avoir entraîné le jeune homme dans une chapelle et de l'avoir contraint à une fellation.

Comme dans les deux autres cas, ces faits sont prescrits.

Par ailleurs, l'analyse réalisée par la Computer Crime Unit de Bruxelles de l'ordinateur de M. Vangheluwe a mis au jour 60.934 fichiers jpg à caractère pornographique, dont certains impliquant des mineurs. Des pages internet qui pourraient mener à de la pornographie infantile ont aussi été récupérées.

Selon le réquisitoire, l'ancien évêque est accusé d'avoir consommé de la pornographie infantile en 2003 et 2005, soit des faits qui ne seraient pas prescrits s'ils étaient établis. Cela pourrait également remettre en cause la prescription de faits plus anciens, selon le magazine, qui publiera l'article dans son édition de mardi.

"L'enquête de la Federal Computer Crime Unit a été menée à la demande du parquet fédéral", a expliqué le porte-parole de ce dernier, Eric Van De Spyt. "Du matériel pornographique a bien été retrouvé mais rien de répréhensible."

 

La DH  3.05.2016