Joël Devillet : les combats d'une vie.
«Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire» J. Jaurès
"Et prima difficultas consistebat in pronuntiatione linguae latinae secundum diversitatem nationum et linguarum. Et in initio, dixisses unumquemque non latine sed propria lingua loqui. Professores Germanici, seu Teutonici, loquebantur latine cum intonatione germanica fortissima, sicut verbi gratia Pater Fuchs, qui nos tractatum docebat de castitate et ordine sexuali. Professores autem Americani aut de Canada Britannica loquebantur latine cum intonatione anglo-saxonica fortissima, dicentes verbi gratia “in nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti, Amen”. Professores autem Italici, loquebantur latine magna cum volubilitate et cum magnis gestibus, et sese movebant professores Italici in lingua latina sicuti pisces in aqua. Professores autem Gallici, professores ex Francia, loquebantur latine cum intonatione gallica fortissima, saepe ponentes accentum tonicum in ultima syllaba verborum, et saepe vertentes literaliter modos loquendi gallicos in linguam latinam."
Par Vincent Peiffer
Chronique Télémoustique 05/03/2010 -
Annemie Turtelboom, vous vous souvenez? Oui, c'est cela: la ministre qui avait adopté la posture du fossile face au problème des sans-papiers. Annemie a donc fort logiquement été promue ministre de l'Intérieur.
Et là, je dois dire que comme organisatrice de l'hommage aux victimes de la catastrophe de Buizingen, elle a tout bien fait. Elle a réservé la salle des Beaux-Arts, convoqué un orchestre de chambre et commandé tout plein de discours à des ocuméniques de toutes sortes. Et puis, il faut dire ce qui est: Yves Leterme qui lit un poème et le prince Philippe qui rehausse la cérémonie de sa charismatique présence, ça donne envie. Annemie avait donc envoyé 700 invitations.
Délicate attention: pour permettre aux familles de victimes de se rendre à Bruxelles, elle avait glissé des tickets de train gratuits dans les cartons d'invitation! Un peu comme si General Motors offrait un amortisseur au personnel d'Opel Anvers. Ou comme si la direction de Carrefour distribuait des bons de réduction à l'achat d'un camembert Coeur de Lion à ses 1.700 futurs chômeurs. C'était sympa, ce côté "Alleï, sans rancune!". Eh bien, malgré cela, moins de 100 familles de victimes sont venues aux Beaux-Arts! Les gens ne sont jamais contents.
En revanche, quel succès pour le bastringue à Monseigneur Joseph Léonard, dimanche! Pour sa première méga-teuf eucharistique d'archevêque, MJ Léo se produisait à Saints-Michel-et-Gudule, qui est un peu le Forest National du peuple catholique. Tout son fan-club était là: curés et sours en fouffette, retraités en costume du dimanche, scouts qui venaient de leur plein gré, Namurois(es) en jupe écossaise et en velours côtelé, et bien sûr les présidents d'honneur du fan-club de MJ Léo, Albert et Paola.
En tout, 2.500 fidèles électrisés par leur Nouvelle Star, qui ne les a pas déçus! Un message du pape B16 pour chauffer la salle, des musiques de ouf pour décoller (comme la version a cappella du Misericordias Domini), et Léo qui lève le pouce à son public avant d'entamer une homélie qui pulse la rage! Ce qui est fantastique, chez MJ Léo, c'est son militantisme social. Je vous dis pas comment il a pilonné les dirigeants de Carrefour, en affirmant que Dieu est un "merveilleux patron qui ne licencie pas, lui!". Là, Léo, je trouve que tu cabotinais un peu: Dieu n'a pas dû licencier puisque les employés quittaient l'entreprise de leur plein gré. Où tu n'as pas tort, c'est question garantie de l'emploi: même les prêtres pédophiles ou les évêques révisionnistes gardent leur job, dans la S.A. Eglise de Rome.
Et tu as raison sur un autre point: en Belgique, l'Eglise est un gisement d'emplois très prometteur. Avec la modernité qui te caractérise, je suis certain que tu as déjà lancé des offres d'emploi sur le Net: "Toi aussi tu perds ton job chez Opel? Deviens curé! Salaire garanti par l'Etat, logement gratuit, personnel de maison. Pose ta candidature sur mon profil Facebook!" Ce qui est chouette, c'est que tu ne fais aucune discrimination sexiste à l'embauche: "Tu étais caissière chez Carrefour? Deviens bonne de curé!" Evidemment, l'Eglise de Belgique ne peut pas accueillir tout le monde: "Tu es homosexuel et as perdu ton emploi de magasinier chez Carrefour? Postule chez Colruyt!"
Promis, après l’interview de Tonton Vangheluwe, Mgr Léonard allait réagir grave! Après Pâques. Quoi, dix jours après sa diffusion? Oui, parce que ç’aurait été dommage de gâcher la joyeuse ambiance de la semaine sainte avec des saletés.
Et donc voilà, promesse tenue: Léo a parlé après la grand-messe de Pâques. Pour nous dire d’abord qu’il n’est pas du tout resté inactif. Loin de là! Par exemple, il a invité les prêtres à "faire pénitence pour leurs collègues déviants". Waouh! Et ce n’est pas tout: il a "prié pour les victimes", dis donc. Oui mais, et pour les propos de Roger Delaglue? Ils étaient "choquants"! Son ton de "vacancier détendu" était "insupportable".
OK Léo, mais ça, on l’avait ressenti nous-mêmes. Même qu’on a gerbé sur le tapis du salon en voyant le Mononcle causer tripotages un peu jouettes avec ses neveux. La question qu’on te demande, Léo, c’est surtout rapport à la sanction suite à son comportement. Y a quoi de prévu? Là, Monseigneur Léonard est un peu étonné. Parce que question des sanctions, c’est déjà fait: "Vous savez, la démission est une sanction très grave, pour un évêque!" En plus, son ex-collègue a été dégagé en deux jours.
Vous imaginez? Le pauvre chou "n’a pas pu faire ses adieux" à ses ouailles. Violent. Donc, c’est tout? Roger la Tripote va se la couler pépère dans les châteaux de la Loire et c’est bon comme ça? La suite, c’est quoi? Là, Léo ne sait pas encore trop bien. Pour une bonne raison toute bête: "Je n’ai pas regardé l’ensemble de l’interview. J’avais d’autres occupations."
C’est vrai que pour juger correctement, il faut être bien informé. Et que dix jours pour visionner une interview qui choque toute la Belgique, c’était un peu shorty. Surtout que Speedy Léo a eu deux fois piscine, qu’il a dû repiquer les poireaux dans son potager et qu’il a aussi organisé la grande chasse aux œufs des séminaristes. On ne peut pas tout faire. Mais Monseigneur regardera certainement l’entretien en entier.
Un jour. Bientôt. Peut-être après l’Ascension. Ou après la Pentecôte. S’il a fini d’arracher les mauvaises herbes dans les bégonias et de passer les poussières à Sainte-Gudule. Mais là, on sent déjà que la réaction sera féroce. Mononcle Roger sera-t-il réduit à l’état laïque? Peut-être bien que oui. Ou que non. Faudra voir à voir avec le Saint-Siège. Pour l’instant, son porte-parole a signalé que le Vatican "réunit les éléments". Comme depuis un an. Donc ça va, on a le temps. Restons zen.
C’est pour ça, aussi, que Monseigneur Léo n’a toujours pas réagi au rapport de la Commission "abus sexuels" de la Chambre, un
mois après sa sortie. Surtout que, hein, on s’attaque toujours aux prêtres qui font touche-kiki! Alors que Léo insiste: les faits de pédophilie imputables aux hommes d’Eglise "ne représentent que 1 % du total
des plaintes". On s’acharne, quoi. D’ailleurs, la Belgique compte 3.660 prêtres pour 8.340.000 adultes non-prêtres. Ce qui nous fait donc, en moyenne, une plainte pour 84.240 laïcs majeurs et une plainte pour 36 curés.
Un taux d’abus sexuels 2.340 fois plus important chez les hommes d’Eglise. Cool, Léo. Pas de quoi s’affoler.
vincent.peiffer@moustique.be Télémoustique 9.05.2011
En novembre 1994 sur les ondes de la RTBF, Mgr Léonard chantait, sur l'air de "La complainte du fossoyeur", de Georges Brassens, une composition de son cru. Il récidivait volontiers un peu plus tard devant les caméras de la télévision. Cet épisode avait provoqué de nombreuses réactions dans les médias, mais elle avait aussi profondément marqué Louis Dubois. C'est pourquoi nous reproduisons ci-dessous l'article que Sonalux y consacrait dans son numéro de décembre 1994.
Voici dans son intégralité, « l'incroyable chef-d'œuvre de Mgr Léonard », ainsi que l'a qualifié le journal "La Meuse".
La complainte du chanoine
Dieu sait que j'n'ai
pas le cœur méchant,
Que j'déteste conflits et différends,
Mais si je n'ferraillais plus,
Je passerais pour un cocu.
J'suis un pauvre grenouîlleur.
Mais qu'je m'nomm'Dubois, Martin, Laporte,
Jacqu'Bredael, Ringlet ou peu importe,
Je vais m'fair'rentrer dans l'lard
Par Monseigneur Léonard.
J'suis un pauvre scribouillard.
J'ai beau lui darder des traits féroces,
Ca gliss' sur sa peau d'rhinocéros.
Sa devise épiscopale
Traduit son flegm' proverbial
"Laissons pisser le mérinos".
Mieux vaudrait laisser André-Mutien
Paître en paix le troupeau qui est sien,
Renterrer la hache de guerre,
Redécouvrir
qu'on est frère.
Y aurait tant de belles choses à faire.
Après cett'tempête dans un verre d'eau,
Je r'tourn', penaud, à mon boulot.
Après tout je n'puis exclur'
Que l'évêque
de Namur
Soit mon allié le plus sûr.
Avant de m'en prendre une autre fois
A ce prélat d'un curieux bois,
Je relirai ma copie,
J'en f'rai pt-être de la charpie :
"Chanoine échaudé craint
l'eau froide".
André-Mutien Léonard, le 25 novembre 1994.
Voici maintenant quelques extraits de la presse du lendemain. Sans plus.
"Quand l'évêque de Namur pousse la chansonnette", Christian Binon, « La Meuse»
… « L'évêque Léonard y réglait ses comptes - d'une manière aussi étonnante qu'amusante - avec quelques-uns de ceux qui ne partagent pas ses convictions ... On relève ainsi successivement les accusations d'incompétence et de lâcheté, et un appel non déguisé à l'autocensure. Mais cela n'est pas grave, prétendent certains responsables de quotidiens catholiques en préférant « écraser »; qu'ils nous disent, dans ce cas, que l'évêque du diocèse de Namur et patron de presse disjoncte très régulièrement... » .
« Le pasticheur et les scribouillards », J-F Dt., La Libre Belgique
« ... Bien au-delà d'une crispation entre un homme d'Eglise et quelques journalistes, le débat pose deux questions plus générales. L'actionnaire d'un quotidien doit-il passer par son journal pour exprimer une injonction ou un conseil à la rédaction ? « Non, et cela procède d'une confusion de rôles »( répondait Jean-Paul Duchateau, rédacteur en chef de La Libre Belgique. Et puis, y a-t-il une déontologie spéciale pour les informateurs religieux ? « Il n'y a pas plus de journalisme chrétien qu'il n'y a de mathématique chrétienne. Il y a une déontologie », avait dit Gabriel Ringlet, vice-recteur de l'UCL »
« Monseigneur maître chanteur », Christian Laporte, Le Soir
« ... Le hic est que son pastiche du "Fossoyeur" du grand Georges à mis en cause l'honneur d'une profession. En l'occurrence, la nôtre, celle de journaliste, qu'il soit ou non chroniqueur religieux ... Sauf le respect que l'on doit à Monseigneur, peu nous chaut, à vrai dire... Là où Mgr Léonard dérape malencontreusement, c'est quand il s'en prend à plusieurs confrères qui pourraient d'une manière ou d'une autre, avoir affaire à lui comme subordonnés ... On rirait de tout cela si l'évêque n'avait plaidé pour qu'il y ait dans la presse catholique, de temps en temps, « une présentation intelligente, positive, bienveillante ». Vous voilà prévenus, journalistes de peu de foi ! »
« Indépendance, rigueur, honnêteté », Yvon Lambert, Vers l'Avenir
« Notre journal est, malgré lui, impliqué dans le conflit qui divise l'Eglise catholique en général et celle du diocèse de Namur en particulier. Cette division nous attriste, mais nous ne voulons être l'otage d'aucune des parties ... »
R.S., La Meuse
« Pas facile d'obtenir des réactions de la part des autorités catholiques. Le cardinal Danneels était absent, hier, en visite à Anvers, "impossible de le joindre" , nous a-t-on répondu à l'archevêché. Mgr Huard, évêque de Tournai, s'est retranché quant à lui dans un silence prudent : no comment. A l'évêché de Namur, où Mgr Léonard était absent, en visite à Houffalize, l'abbé Bayet, vicaire général, s'est bien gardé de dire quoi que ce soit ... »
« Vous avez dit : chrétien? », Benoît Degardin, La Nouvelle Gazette
« Au-delà de la pitrerie dont on peut croire qu'elle était destinée à humaniser l'image que l'intéressé donne de lui (si c'est ça, c'est de toute façon raté), comment ne pas crier son étonnement et sa révolte face à pareille intolérance ! Entre le divorcé qui manifeste sa volonté de communier, auquel le Vatican refuse ce geste de foi, et l'évêque qui, de sa hauteur, suggère avec fermeté qu'on enterre le débat, où est le vrai chrétien ? »
« La complainte de Mgr Léonard », Benoît Vandeputte, La Croix, Paris
« ... En Belgique, c'est la consternation. Le porte-parole des évêques, le P. Pirlot, déplore ce qui est « pour le moins une maladresse », sans vouloir revenir sur la chanson d'un « niveau de cabaret ». De contesté, Mgr Léonard frise aujourd'hui le discrédit, pour lui-même et pour l'Eglise belge en ses évêques. »