Joël Devillet : les combats d'une vie.
«Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire» J. Jaurès
Mgr Léonard passera bientôt le flambeau à Jozef De Kezel à la tête de l’archevêché de Bruxelles-Malines. Celui qui fut primat de Belgique pendant près de 6 ans prononce ce weekend sa dernière homélie à l’occasion de célébrations d’adieu à Bruxelles et Nivelles, après Malines la semaine dernière. C’est en France qu’il devrait ensuite poursuivre son chemin, comme chapelain auxiliaire au Sanctuaire de Notre-Dame du Laus. Ce départ, il le vit dans "la paix et la joie", avec un sentiment de "gratitude".
Quand on lui demande ce qu’il voudrait que l’on retienne de lui, Mgr Léonard évoque son désir d’être proche des gens et de les "faire grandir" : "Je suis quelqu’un qui ne dit jamais : de celui-là on ne tirera jamais rien de bon. Au contraire, je pense que quand on fait confiance aux gens, on leur donne l’occasion de grandir et ça, ça a été une des passions maîtresses de ma vie : faire confiance".
Il n’empêche que ses années d’épiscopat ont été émaillées de polémiques suite à des déclarations à propos des homosexuels, du sida ou encore, comme en avril dernier, de l’avortement. Des mots dans la droite ligne d’une Eglise conservatrice, qui ont pu choquer ou blesser, mais que l’homme continue à assumer : "Aucun regret si on veut bien écouter ce que j’ai dit ou lire ce que j’ai écrit dans son contexte. Mon métier de philosophe, d’enseignant, m’a amené à utiliser les mots toujours avec une grande précision et quand on veut bien situer mes soi-disant déclarations dans leur contexte, elles font réfléchir, elles suscitent peut-être une réaction mais jamais en blessant les gens". Selon lui, ce sont les médias qui ont eu tendance à caricaturer son message par souci de "plaire à l’opinion dominante".
Dans son homélie d’adieu, il souligne que ses moments les plus précieux ont été ceux passés aux côtés des prisonniers, des personnes séparées, divorcées ou remariées ou encore des réfugiés et des sans-papiers. Mais pas de mots pour les victimes de pédophilie de la part de celui qui a pourtant été mis en cause et condamné pour ne pas avoir suffisamment pris ses responsabilités dans un dossier concernant un abbé pédophile. Réponse de Mgr Léonard : "On en a eu au moment où le problème était aigu et où il se posait. Je pense que depuis lors, on a trouvé dans l’Eglise catholique de Belgique une manière d’écouter les victimes, de leur rendre justice, qui a été honnête, qui a été appréciée et qui a été vécue en collaboration avec la commission parlementaire créée à ce sujet. (…) En ce qui me concerne personnellement, il est vrai qu’en appel on m’a attribué une responsabilité de 5% dans la situation de la victime d’un prêtre que je n’ai jamais voulu protéger, parce que je n’avais aucune raison de le protéger - c’était plutôt un adversaire public… Je ne trouve pas ça tout à fait correct mais un jugement est un jugement et si ce jugement a pu faire du bien à la victime, je m’en réjouis sincèrement car il s’agit d’une personne pour laquelle j’avais et ai toujours une grande estime".
A propos de son successeur Jozef De Kesel, réputé plus moderne, André-Joseph Léonard estime que la différence pourrait surtout se marquer dans la forme plutôt que dans le fond. "Je pense que ce sera à peu près le même contenu" résume-t-il, "avec des variations sur un même thème, comme en musique".